Ce billet est le premier d’une longue série portant sur la très intéressante et stimulante thématique de « l’interactivité et l’efficacité en classe ». Ceux et celles qui s’intéressent de près au développement technopédagogique de notre milieu savent que plusieurs actions de notre plan TIC institutionnel portent sur l’expérimentation de divers outils en classe et l’optimisation de leur utilisation.

Cette semaine, nous avons la chance d’aller sur le terrain avec Julie Dehin, enseignante en français au département d’Arts et lettres. Elle vous partage sa pratique dans l’utilisation des télévoteurs en classe.

Note linguistique : Selon le dictionnaire Antidote, un télévoteur est une « personne qui participe à un télévote » alors que le télévote est un « vote à distance par un moyen de télécommunication ». L’expression télévoteur est bien ancrée dans l’usage dans le domaine de l’éducation, mais les dictionnaires ne témoignent pas encore de ce vocabulaire spécialisé. Vous retrouverez également dans la littérature les expressions « clickers », unités de vote, boitiers d’évaluation et systèmes de réponses.


Huguette Dupont (HD) : Julie, peux-tu nous dire ce qu’est un télévoteur?

Julie Dehin (JD) : C’est un transmetteur d’information, de l’étudiant au professeur et même de l’étudiant au groupe. Je leur pose des questions, puis à l’aide d’une petite machine ils peuvent y répondre de manière anonyme. Une fois que tout le monde a répondu, on peut voir les résultats de la classe à l’écran.

HD : Depuis quand utilises-tu les télévoteurs en classe?

JD : J’ai commencé à les utiliser à la session d’hiver 2013. Je les ai aussi utilisés cet été et je poursuis cet automne. C’est donc ma troisième session d’utilisation.

HD : Qu’est-ce qui t’a incité à expérimenter cette technologie?

JD : Au fait, c’est toi Huguette qui en as parlé dans une réunion de département en Arts et lettres. Je cherchais de nouveaux moyens pour animer ma classe. Je ne connaissais pas du tout cet outil et ça m’a donné le gout de l’essayer.

(HD : Oups! Je ne m’attendais pas à cette réponse… J’ouvre donc une parenthèse pour une petite mise en contexte. Effectivement, dans le cadre de la démarche d’élaboration d’un Plan TIC pour le programme Arts et lettres, une des étapes consistait à « découvrir le potentiel des TIC ». Il y a eu diverses démarches de faites dans ce contexte, à la recherche d’activités pédagogiques qui pourraient être pertinentes pour le département. J’ai alors présenté au groupe diverses tendances, d’ici et d’ailleurs, notamment en ce qui a trait à l’interactivité et l’efficacité en classe à l’aide du tableau interactif, de télévoteurs, de tablettes tactiles ou d’ordinateurs portables.)

HD : Quels besoins ou quelles problématiques pédagogiques souhaitais-tu combler ou résoudre avec cet outil?

JD : C’est difficile de savoir réellement où se situent les étudiants par rapport à la matière. Lorsqu’on pose des questions aux étudiants pour vérifier s’ils ont bien compris, ce sont souvent les mêmes étudiants qui répondent, soit les meilleurs ou les mois gênés. Les autres se taisent, on ne les entend jamais.

HD : Tu t’assures donc maintenant que tous les étudiants répondent aux questions que tu poses?

JD : Oui, c’est obligatoire. On le voit à l’écran lorsqu’il manque des réponses. On ne sait pas qui c’est, mais j’interviens en nommant leur pseudonyme : « Tapette à mouches », on attend ta réponse!

HD : J’en conclus que tu leur donnes l’opportunité de se choisir un surnom au début du cours?

JD : Oui, découvrir les surnoms des autres apporte un côté très ludique, ça les fait rire. Évidemment, ils ont des règles à respecter, ce ne doit pas être vulgaire, déplacé ou irrespectueux.

HD : Est-ce que l’intégration du télévoteur dans tes cours est concluante? Y vois-tu une réelle valeur ajoutée?

JD : Tout à fait, pour moi c’est positif. Je les utilise souvent et je les utiliserai encore dans le futur. Pour le moment, je constate deux bénéfices importants. Ça me permet de varier les stratégies d’animation de la classe dans la tenue d’activités participatives, mais surtout, c’est aussi très efficace pour prendre le pouls de la classe. On peut ainsi plus facilement adapter le contenu du cours en fonction des forces et des faiblesses détectées, c’est beaucoup plus concret.

Je n’ai pas encore poussé la validation, mais je pense aussi que ça peut servir d’autoévaluation à l’étudiant. De mon côté, je fonctionne avec les résultats du groupe pour m’adapter en fonction de la masse, mais si un étudiant manque presque toutes les questions, j’imagine que ça lui donne des indices!

HD : Qu’est-ce que tes étudiants pensent de l’utilisation du télévoteur en classe?

JD : Ils adorent les utiliser, c’est toujours positif, leur réaction est évidente.  Les premières fois, on aurait dit des enfants. Il faut les calmer un peu, à leur premier contact c’est une petite « bébelle » pour eux. Après leur première expérience, ils me demandent habituellement s’ils vont pouvoir les réutiliser. Par contre, je ne les utiliserai pas à chaque cours, car je veux que ça demeure spécial, j’aime bien varier les activités.

Dans le cadre d’un exposé oral à réaliser, des étudiants m’ont même demandé s’ils pouvaient les utiliser eux-mêmes pour interagir avec la classe.

Aussi, lors de l’évaluation du cours à la fin de la session d’hiver 2013, quand je leur ai demandé ce qu’ils avaient apprécié du cours, plusieurs étudiants ont nommé « les petites machines pour répondre ». Ils apprécient le côté ludique.

HD : Qu’est-ce que ça implique concrètement en matière de préparation, de temps de classe et de logistique?

JD : Les avantages dépassent largement ce que ça implique de les utiliser. Les contraintes logistiques sont vraiment faibles. C’est facile, on passe à la bibliothèque chercher le sac de télévoteurs quelques minutes avant le cours, on les distribue en classe, on branche le récepteur à l’ordinateur et c’est prêt. Pour les étudiants, la première fois on doit prévoir du temps pour leur expliquer le fonctionnement, mais c’est facile pour eux et ça prend deux minutes. Quant à moi, j’ai reçu une petite formation avec Manon et j’ai pu tout de suite me débrouiller [Manon Labrecque, technicienne en informatique, Carrefour TIC]. Pour utiliser les télévoteurs, je fais généralement des questionnaires d’environ 15 questions et je prévois 20 minutes dans mon cours.

Utiliser les télévoteurs ne me donne pas l’impression d’alourdir ma tâche puisque de toute façon, j’aime varier les activités qui permettent la mise en pratique ou la réactualisation des savoirs acquis lors des exposés théoriques. Les télévoteurs font tout simplement partie de ma banque d’options, au même titre que des mots croisés ou des activités de discussions. Ça fait tout simplement partie de ma préparation de cours, que ce soit avec les télévoteurs ou pour un autre type d’activité.

HD : As-tu pensé à d’autres contextes d’utilisation du télévoteur dans le futur?

JD : Oui, je me disais justement que dans le cadre d’un débat ce serait très utile. J’ai l’intention d’expérimenter le télévoteur dans ce contexte pour stimuler les discussions.

Aussi, je sais que certains enseignants aiment faire une synthèse en fin de session. Je crois que ce serait très pertinent pour eux.

Je pense aussi qu’on peut faire des évaluations sommatives avec les appareils et récupérer les résultats. Ce serait pratique pour les contrôles de lecture par exemple.

HD : Et si je comprends bien, tu as contaminé tes collègues?

JD : Oui. L’hiver dernier, je planifiais mon cours avec une collègue et je lui ai montré comment ça fonctionne pour que nous puissions inclure cet outil dans notre planification. Cette session-ci, j’ai aussi assisté une collègue dont c’était la première utilisation.

HD : Super! Il y a donc un climat d’entraide et de partage de pratiques qui s’installe entre vous et j’en suis ravie. Je te remercie Julie d’avoir partagé avec nous ton expérience.

JD : Ça me fait plaisir! J’ai vraiment aimé mon expérience et j’ai eu de la rétroaction positive de mes étudiants.


Si l’interactivité et l’efficacité en classe vous intéressent, surveillez attentivement la publication des prochains billets sur cette thématique et profitez des formations qui vous seront offertes cette année!