La sixième édition du manuel Pour réussir : Guide méthodologique pour les études et la recherche, de Bernard Dionne vient d’être publiée. Je vous propose dans ce texte, un compte-rendu analytique et critique du manuel, ainsi qu’un bref survol des autres manuels et sites web qui abordent cette question.

Ce guide s’est imposé depuis la première édition, avec plus de 250 000 exemplaires vendus, comme une référence.  En plus d’être retenu comme manuel dans certains programmes, il est souvent placé à la réserve et il est fortement recommandé par les enseignants. Son originalité tient à la multiplicité de ses champs d’intérêt.  Il peut servir, à la fois pour gérer sa vie d’étudiant (se motiver, gérer son temps), améliorer son rendement scolaire (prendre des notes, lire attentivement, étudier, réussir ses examens et travailler équipe) et comme support méthodologique, pour rédiger un travail, chercher en bibliothèque et sur Internet, citer ses sources et présenter matériellement un travail écrit. Pour ces raisons, à la bibliothèque ou en classe, on se réfère à Dionne comme on se réfère au Robert pour la langue écrite.

Cet ouvrage est destiné avant tout aux étudiants du niveau collégial, tant ceux de l’enseignement régulier que ceux de l’éducation des adultes.

Cette nouvelle édition, qui remplace celle publiée il y a cinq ans, propose plusieurs innovations. On passe de 254 à 278 pages tout en maintenant 12 chapitres. On a retiré les témoignages « Pleins feux sur la réussite » de l’édition précédente. On propose plutôt, au début de chaque chapitre, un Plan du chapitre et une carte conceptuelle. Ces derniers permettent de visualiser et de saisir en un clin d’œil, le contenu et le déroulement logique du chapitre.  Une page Testez-vous permet, avant d’aborder le chapitre, de poser un diagnostic sur ses habitudes ou ses connaissances. L’auteur poursuit son usage d’encadrés intitulés Tactique, avec des outils pour aller plus loin, des techniques et des exemples. Chaque chapitre se termine par un encadré Compétence qui propose un comportement et un savoir-faire.

          

Le premier chapitre, Se motiver, est nouveau et propose à l’étudiant une bonne introspection pour maintenir sa motivation. Par une meilleure connaissance de soi, les secrets de la réussite sont explicités et l’auteur insiste sur l’importance d’avoir un plan d’action et de se fixer des objectifs.  Les cinq chapitres suivants proposent, essentiellement, comme l’édition précédente, les éléments de base du métier d’étudiant : gérer son temps, prendre des notes en classe, lire attentivement, étudier, réussir ses examens et travailler en équipe. On propose toujours quatre types de lecture, mais pour se préparer aux examens la méthode SQ4R fait place à la SQL3R : survoler, questionner, lire, restructurer, réciter et réviser.

Le chapitre Lire activement propose une bonne réflexion sur l’acte de lire, une typologie et de bonnes remarques. L’auteur propose la fiche de lecture comme « outil idéal pour consigner des informations recueillies lors d’une recherche documentaire ».  Je ne crois pas que les étudiants du niveau collégial colligent des fiches titre, bibliographique, résumé, citation, commentaire ou réseaux de concepts et les rangent dans une boite comme dans cette illustration ci-contre.

Je crois toutefois, comme Dionne, que cette étape d’appropriation et de synthèse du contenu  est importante et est trop souvent ignorée de la part des étudiants. La proposer sur des fiches 5 X 7 me semble toutefois obsolète. Heureusement, l’auteur propose également l’édition de fiches électroniques avec les mêmes modalités que celles qui sont imprimées.

Suivent successivement les chapitres consacrés à la rédaction de textes, dont notamment plus de six pages sur la dissertation en philosophie, les bases de la recherche documentaire, la recherche en bibliothèque et sur Internet.  Soulignons la place privilégiée que l’auteur accorde à la bibliothèque, à ses ressources traditionnelles, mais également celles disponibles sous forme numérique.  Ce choix, à la fois éditorial mais aussi académique, de proposer de débuter une recherche en bibliothèque ou à partir de son site web et de son catalogue, plutôt que sur Google, confirme notre rôle et celui de nos institutions, à titre de Passeurs de savoirs .

La démarche retenue par Dionne pour le travail de recherche est subdivisée en 5 étapes :

La section de la collecte des données est très succincte. On se limite à énoncer et définir brièvement la méthode historique, l’analyse de contenu, l’entrevue, l’analyse quantitative et l’observation. Il faut savoir que l’éditeur propose un autre manuel portant le titre IPMSH : une approche multidisciplinaire http://www.cheneliere.ca/6326-livre-ipmsh.html   qui aborde cette problématique et qu’un éditeur concurrent, ERPI, y va aussi d’un manuel complet sur la question.

Les chapitres 9 : Chercher et évaluer l’information en bibliothèque et dans Internet, 10 : Citer et présenter l’information et 11 : Présenter un rapport, intéresseront particulièrement le personnel des bibliothèques souvent sollicités par les enseignants ou les étudiants, à la recherche de modèles ou de normes.  À ce chapitre, Dionne innove en ajoutant au modèle traditionnel Auteur-Titre, souvent appelée la méthode Dionne, le modèle de plus en plus utilisé en sciences, en psychologie et en éducation : celui Auteur-Date, de l’American Psychological Association APA, 6e édition. L’auteur s’aligne sur la traduction et l’adaptation non officielle, mais combien utile et reconnue dans le milieu, de Dominic Desaulniers de la Bibliothèque ÉPC-Biologie de l’Université de Montréal. http://guides.bib.umontreal.ca/disciplines/20-Citer-selon-les-normes-de-l-APA

Un dernier chapitre portant le titre Réussir son exposé oral propose des éléments susceptibles d’améliorer ses performances ainsi que de l’information concernant l’usage du logiciel PowerPoint. Cette dernière, bien que succincte, présente des conseils utiles.

Que retenir de cette nouvelle édition?  Soulignons avant tout le travail soigné de la firme Pige communication de Québec, qui assure la mise en page et tout le graphisme. Dans certains cas, un tableau ou un graphique valent mille mots. On veut le voir et non seulement le lire.  Plusieurs pages du manuel proposent, à cet effet, de bons tableaux ou des saisies d’écran, comme en témoignent celles reproduites dans ce texte.

À l’heure de la lutte au plagiat et des considérations éthiques, le manuel consacre plusieurs pages à cette question et des modèles de citations variés. L’ajout du modèle de citation de l’APA et les nombreux exemples proposés sont également un élément phare de cette dernière édition.

Il faut dire que l’auteur s’est entouré pour cette édition d’une vingtaine de collaborateurs du milieu collégial : enseignants, bibliothécaires, conseillers pédagogiques. À ce propos, je tiens à préciser que j’ai collaboré modestement  à cette édition, principalement aux chapitres 9 et 10.  Cette collaboration m’empêche-t-elle d’être totalement objectif dans mon évaluation? La question mérite d’être posée et je vous laisse le soin d’en juger, à la lecture de ce compte-rendu critique.

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Comment ce manuel se compare-t-il en rapport avec les autres manuels publiés?

Avant tout, un regard rétrospectif nous permet d’affirmer que beaucoup de chemin a été parcouru depuis la publication de Raymond Boucher : Les étapes de la rédaction d’un travail en bibliothèque, édité une première fois en 1969 et pour la dernière fois en 1971!  Si on met de côté les ouvrages spécifiques à la rédaction de thèses et à la recherche en sciences sociales, ainsi que tous les guides imprimés localement par les cégeps ou certaines facultés d’universités, plusieurs manuels, du même genre que Dionne, ont été publiés au fil des ans:

Goulet, L. et G. Lépine. Cahier de méthodologie. 4e éd. Montréal, Université du Québec à Montréal, 1987, 231p. Pendant longtemps ce livre a servi de modèle à suivre.

Létourneau, Jocelyne. Le coffre à outils du chercheur débutant. Montréal, Boréal, 2006, 264p . Publié en 1989, ce manuel a été réimprimé en 2006 et est encore disponible en format PDF par l’intermédiaire du pretnumerique.ca

Letarte, André. Production d’écrits (série de 6 fascicules). 3e éd. Québec, Université Laval. 1994.

Espinasse, Marie-Chantal et al. Parcours sans détour : Guide d’accompagnement méthodologique. Montréal, Association québécoise de pédagogie collégiale, 1996. Ce qui était avant tout un guide concernant la rédaction est resté sans suite ou mise à jour.

Tremblay, Raymond Robert et Y. Perrier. Savoir Plus : outils et méthodes de travail intellectuel. 2 éd. Montréal, Chenelière Éducation, 2006.  Publié une première fois chez McGraw-Hill en 1989, en 1994 et en 2000 chez McGraw-Hill Chenelière et réimprimé en 2006 , ce guide a servi de modèle pendant plusieurs années, mais n’a pas été réédité, l’éditeur ayant sans doute préféré se limiter à Dionne.

Jimenez, A et J.-E. Tadlaoui. Guide méthodologique universitaire. Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2011. 146 p. Un programme subdivisé en 12 chapitres et 12 semaines. Bien que très succinct et surtout axé sur la rédaction, ce guide aborde l’essentiel, même le modèle de bibliographie Auteur-Date.

Lambert-Chan, Marie. Petit guide de survie des étudiants. Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2012. 160 p. Une première édition pour un guide qui aborde de manière trop brève des sujets comme la rédaction des travaux (3 pages).

Ce survol rapide permet de conclure que le manuel de Bernard Dionne, qui en est à sa 6e édition, est sans aucun doute l’ouvrage le plus complet et exhaustif sur le marché. C’est celui qui est le plus en mesure de répondre aux nombreux défis et exigences de l’enseignant collégial.

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Qu’est-il de la version web du manuel?

Le manuel de Bernard Dionne possède un prolongement web sur la plate-forme de Chenelière Éducation.  Pour l’instant ce n’est qu’une version en ligne du manuel. Nous n’y avons pas trouvé les autres outils documentaires mentionnés dans le livre. À savoir les ressources disciplinaires, le gabarit de présentation d’un rapport et le tout nouveau Biblioguide pour établir une bibliographie. Le site : http://www.pourreussir.com/ pointe toujours vers la version précédente du manuel.  Des mises à jour s’imposent.

Qu’en est-il ailleurs sur la toile?

Le premier site de référence qui nous vient à l’esprit est l’Infosphère de l’UQAM, http://www.bibliotheques.uqam.ca/InfoSphere/ qui se veut : « un outil de formation utile pour développer ses habiletés de base en recherche d’information ».  Disponible en deux versions, sciences humaines et sciences de la gestion et sciences et technologies, le site a fait l’objet d’une mise à jour substantielle en 2009, avec l’ajout de 5 modules et un jeu-questionnaire. Depuis cette date, certains ajouts ou certaines modifications plus mineures ont été apportés, dont la dernière en date du 25 octobre 2011. Le site est également disponible, en version légèrement adaptée pour les étudiants de l’Université Laval et de l’Université de Montréal . Une version est également proposée par le Collège Édouard Montpetit, mais cette fois-ci, le tout est appuyé par de solides animations crées par ce cégep et pertinentes à l’ensemble du réseau collégial.

Le site original garde toujours son intérêt  pour l’exhaustivité de la démarche retenue et les informations proposées. Avec le temps, on lui reprochera un manque d’interactivité et, sans doute, une trop grande linéarité.

C’est ce manque d’interactivité que vient combler le tout nouveau site Diapason disponible à l’adresse : http://www.mondiapason.ca fruit de la collaboration entre la bibliothèque de l’Université Laval et six bibliothèques collégiales de la région de Québec.

Fruit de la collaborations de bibliothèques collégiales et de la bibliothèque de l'Universit.é Laval : Diapason

Le site Chercher pour trouver, qui en est à sa quinzième année, s’adresse avant tout aux étudiants du secondaire. Il est supporté par l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information (EBSI) de l’Université de Montréal.

Le site ABCdoc : Guide méthodologique de recherche et de traitement de l’information scientifique et technique, proposé par le Service Universitaire Pédagogique de l’Université Toulouse 3 est intéressant à première vue par sa présentation graphique. Une consultation plus avancée confirme que le contenu est surtout axé sur la rédaction et le site propose très peu d’éléments méthodologiques. Au niveau de la citation des sources, on se limite à quelques exemples selon le modèle traditionnel Auteur-Titre.

Le site Cerise : Conseil aux étudiants pour une recherche d’information spécialisée efficace date de 1999 et a fait l’objet d’une mise à jour en 2007. Proposer d’utiliser les versions imprimées des encyclopédies Universalis et Britannica en dit long sur l’utilité de ce site.

Inutile de préciser que l’on retrouve facilement sur Internet, à la fois des Guides méthodologiques et des Guides de présentation des travaux écrits, complets et mis à jour, souvent en format PDF. Une simple recherche sur Google nous mène à des ressources comme celles du Cégep de l’Outaouais , de la Faculté d’Éducation permanente de l’Université de Montréal , de l’Université de Sherbrooke  , du Cégep de Sainte-Foy  ou du Collège Mérici.

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En conclusion, à l’heure actuelle, le manuel de Bernard Dionne est sans aucun doute le manuel le plus complet et le plus pertinent au niveau de l’enseignement collégial. Le site Infosphère de l’UQAM  tient toujours la route à cause de son exhaustivité et de sa facilité de navigation. Le tout nouveau site Diapason  propose une approche innovatrice et son contenu est présenté avec beaucoup d’interactivité.

Doit-on se limiter au web ou au manuel de Dionne ?

Les deux ressources, tant le numérique que l’imprimé sont pertinentes et offrent des avantages complémentaires.

L’auteur tient à remercier Élise Laplante, sa collègue à la référence pour la révision du texte et ses précieux commentaires.  ;-0